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Il y a quelques semaines, je me suis inscrit à mon tout premier concours de nouvelles. Dans un premier temps, c'est un concours à échelle locale puis, dans un deuxième temps, la nouvelle sélectionnée est envoyée à un jury au niveau national.
Vu que le thème imposé était celui du cinéma (puisque c'est un réseau de cinémas qui organise le concours), je leur ai adressé "Le survivant", une nouvelle que j'avais écrite récemment et que certains d'entre vous avaient peut-être déjà lue sur mon ancien blog. Je la remets d'ailleurs ici en intégralité à la fin de ce billet.
Bref, ce mercredi 19 octobre avait lieu le résultat des délibérations et c'est donc ma nouvelle qui a été choisie pour concourir au niveau national par 6 voix contre 2. Je suis bien content. Cerise sur le gâteau, je repars avec quelques livres et des places de cinéma. Mais surtout, je prends cette petite victoire comme un encouragement. Avec mon syndrome de la page blanche, c'est un pas important. Mais petite victoire malgré tout parce que je dois quand même être honnête et relativiser. Il y a eu très peu de participants au niveau local et curieusement ceux qui ont envoyé leurs nouvelles étaient plutôt éloignés géographiquement. Moi-même, je suis déjà à une heure de route du cinéma qui délibérait cet après-midi.
Ce soir, lorsque je suis arrivé au cinéma de Terrasson, très (trop ?) en avance comme d'habitude, le jury n'avait pas fini de délibérer. Nath qui avait tenu à m'accompagner et moi-même, nous nous sommes assis devant le cinéma en attendant. L'air était frais mais c'était agréable. Vu que nous étions les premiers, je m'attendais à voir arriver les autres participants au fur et à mesure que le temps s'égrenait. Mais personne !
Finalement, les portes du cinéma s'ouvrent et on me dit que le lauréat a été sélectionné. Nath et moi entrons donc dans le cinéma mais je ne vois toujours personne à part nous deux et les membres du jury. Finalement, un homme entre et se joint à nous.
Les résultats tombent et parmi les nouvelles reçues, c'est donc la mienne qui est déclarée vainqueur. Enfin, une des miennes. Parce que je leur avais aussi adressé Sans voix mais qui n'a pas emporté l'adhésion. Heureusement que je m'étais fait la réflexion qu'elle serait probablement un peu hors-sujet par rapport au thème du cinéma (malgré l'allusion au monde du doublage) et que je m'étais rabattu sur Le survivant.
Heureusement aussi que je me suis déplacé parce que j'étais bien le seul. Et si j'avais été le seul à avoir fait le déplacement pour avoir été recalé au final, j'aurais gagné ma journée ! Ils ont eu du bol : sans le savoir, c'est l'auteur dont la nouvelle avait remporté les suffrages qui était présent. Parce que le monsieur qui était entré dans le cinéma juste après moi était en fait... le correspondant de presse ! (que je remercie chaleureusement au passage pour la photo de groupe)
Je vous laisse imaginer le tableau : aucun des particpants dans le cinéma à part moi, les huit membres du jury, le correspondant de presse. Eh bien, malgré tout, ça a été un moment très agréable, très convivial du coup. J'ai pu avoir des retours sur mes écrits, expliquer mon approche de l'écrit, mon besoin de créer une atmosphère, une ambiance, d'avoir des personnages qui prennent vie même au détriment de l'histoire parfois, exposer moi-même mes doutes sur mon manque d'inspiration qui me fait écrire bien moins que je le voudrais. Ils ont été très élogieux sur mon travail, ayant lu la nouvelle à plusieurs reprises car ils trouvaient que le tout était bien mené. Tout juste ont-ils émis quelques réserves sur ma conclusion dans laquelle je faisais un parallèle entre ma nouvelle et un fait divers ayant réellement existé. Pour eux, c'était finalement superflu. Nous avons pu argumenter tous ensemble dans un très bon esprit. En plus, j'ai gardé contact avec l'une des membres du jury qui est la présidente d'un atelier d'écriture et qui devrait me permettre, au travers d'exercices, de retrouver la régularité et, je l'espère, l'inspiration.
Bref, j'ai beaucoup aimé cette soirée dont je n'attendais pas grand chose au départ. J'aurais préféré qu'il y ait davantage de participants et surtout que ceux-ci eussent été présents ce soir, ce qui nous aurait permis d'échanger. Mais bon, l'essentiel est de repartir avec le plein de confiance. Et puis, même si, soyons réaliste, il est très peu probable que Le survivant connaisse un beau parcours au niveau national, on peut toujours se dire que l'aventure continue ! Et autre motif de satisfaction : il semblerait que ma première dauphine soit une ancienne instit de Nath, très aguerrie à cet exercice d'écriture de nouvelles et à ce type de concours. Donc, à défaut de la quantité, la qualité des participants semble avoir été au rendez-vous. C'est d'ailleurs à elle que sont revenues les deux voix m'empêchant de faire l'unanimité.
Allez, pour mon plaisir et j'espère le votre, petite piqûre de rappel avec... Le Survivant !
J'étais là dans cette immense boite. J'étais le dernier. Il y a une heure encore, nous étions un bon nombre mais les autres avaient eu moins de chance. Il ne restait que moi mais je ne me faisais pas d'illusion. J'allais y passer aussi, d'autant que je n'avais nulle part où me cacher. Il me trouverait forcément, malgré la pénombre. De toute façon, à quoi bon ? J'avais déjà tant souffert... et tout ça pour en arriver là ! J'avais cet aspect que je jugeais personnellement ragoûtant, du fait de mes brûlures au premier degré, mais curieusement cela semblait plaire... pour mon malheur !
Je me sentis observé et effectivement un oeil m'épiait. Me distinguait-il pour autant, je n'aurais su le dire. Mais le simple fait de le voir lorgner dans ma direction ne me poussait pas à l'optimisme. Il tendit le bras. Cette fois, j'étais perdu. C'était mon tour.
J'entendis alors une forte détonation. Puis une autre. Je perdis alors l'équilibre et sentis glisser la boite dans laquelle je me trouvais. Je ne compris pas tout de suite ce qu'il se passait mais c'était l'affolement tout autour de moi. Les gens hurlaient. Un type s'était mis à crier : "Tu croyais que tu allais nous emmerder encore longtemps comme ça ?" La panique semblait avoir englouti toutes les personnes présentes dans la salle. Je ne voyais pas grand chose de là où j'étais mais les gens semblaient courir dans tous les sens. Les cris s'amplifiaient.
J'étais sauvé. Pour le moment du moins. Je ne comprenais pas trop ce qu'il se passait mais en tout cas, personne ne faisait plus attention à moi. Lui en tout cas m'avait oublié. Je devais simplement veiller à ne pas me faire écraser par cette meute d'enragés. Mais ça avait l'air de s'arranger là-aussi. La pièce semblait se vider très progressivement, toujours dans un brouhaha de cris assourdissants certes, mais elle se vidait et c'était bien là l'essentiel. Un répit reste un répit. Ça ne changerait peut-être pas fondamentalement ma vie mais enfin...
Au bout d'un moment, il n'y eut plus que moi dans la salle. Enfin, je crois. Je n'étais pas idéalement placé pour en juger mais il me semblait bien. Sauf que je ne pouvais pas bouger et que je finirais bien par être découvert et tué. Ou alors, je resterais là à me rabougrir et m'assécher. Dans les deux cas, l'optimisme n'était pas franchement de rigueur.
J'appris plus tard, lorsque la police prit possession des lieux tandis que j'étais toujours planqué dans cette boite tellement trop grande pour moi, que le type qui nous avait tous tués un à un avait lui même été abattu par un gars assis derrière lui. Ce dernier s'était levé et pan, lui avait mis une balle en pleine tête. Tu m'étonnes que la boite soit tombée et moi avec !
Apparemment, le tireur n'avait pas supporté le bruit de sa mastication. Il faut dire que c'était assez inélégant et que ce n'était pas évident pour pouvoir suivre le film. Encore que moi, je m'en fichais, je ne pouvais pas voir les images de là où j'étais et j'étais bien trop stressé à l'idée d'être le prochain grain de pop-corn à être englouti par ce goinfre. Tous mes potes y étaient passés. Sauf moi, tu parles d'une aubaine ! J'avais vu à maintes reprises sa main plonger dans la boite et en ressortir une poignée qu'il mettait avidement dans sa bouche immense en mâchant et déglutissant à grand bruit. Selon la police, un gus en avait eu ras le bol qu'on lui gâche ainsi son film et lui avait dit sa façon de penser. Le fameux "Tu croyais que tu allais encore nous emmerder longtemps comme ça ?" que j'avais entendu juste après m'être cassé la gueule.
Finalement, ça ne changeait pas grand chose pour moi. Je n'avais pas été dévoré par cette gueule béante, mais j'allais finir très probablement dans une poubelle dès que la femme de ménage viendrait faire son petit tour. A moins que la police ne me garde comme pièce à conviction. J'aurais l'air bien, tiens, confiné au chaud dans un sachet plastique ! Enfin, c'est ma vie, quoi ! Au début, c'est le pied, on pousse en pleine nature, baigné par le soleil ou les pluies, on a une belle couleur jaune orangé. Et puis quand on parvient à échapper au bec de la poule ou à l'estomac des humains, on finit cramé et caramélisé ! Vous parlez d'un avenir ! Moi, je suis résigné de toute façon... Allez hop, faites de moi ce qu'il vous plaira, messieurs-dames, gobez-moi, mangez-moi, cramez-moi, laissez-moi à même le sol d'un ciné comme une merde, je m'en fous... Voilà, c'est dit...
Cette petite histoire est authentique. Les grains de pop-corn ont existé et ont effectivement "causé" la mort d'une personne. Samedi dernier, à Riga en Lettonie, un homme qui mastiquait trop bruyamment son pop-corn a été abattu par son voisin à l'issue de la séance alors que le cinéma programmait "Black Swan" de Darren Aronofsky avec Natalie Portman.
Il n'y a que pour le petit grain de pop-corn survivant que le doute est permis. Et encore...
Le monde est fou, on vous dit...
(cliquez pour agrandir, MAJ du 16/11/2011)
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