dimanche 12 mai 2013

Cheminements dans l'écriture (2e Partie)



Le Cheminement © Gaia Orion

Piccolo est l'une des nouvelles auxquelles je suis le plus attaché et pourtant la gestation s'est faite dans la douleur, avec une interruption de plusieurs mois et une première fin, bâclée et non assumée, que j'ai réécrite, chose rarissime chez moi. Je me suis alors rendu compte combien il était difficile de faire abstraction des problèmes extérieurs. Ma noirceur du moment née de problèmes divers se répercutait sur ma façon d'écrire et j'étais en train de dénaturer un texte qui me tenait pourtant à coeur. Heureusement, les conseils précieux d'amis m'ont permis d'éviter ce naufrage et de reprendre la barre au bon moment pour amener Piccolo à bon port. Mais j'en ai bavé. 

Je suis attaché à Piccolo parce qu'il existe. Il tenait un petit troquet en Aveyron et il était effectivement un ancien clown. Je ne l'ai vu qu'une fois, je ne sais pas s'il y est toujours. Mais cet homme vieillissant avait quelque chose de touchant, une humanité qui m'avait ému. Le reste n'est que fiction. Et hormis cette mauvaise passe de plusieurs mois et les doutes qui allaient avec, j'ai pris beaucoup de plaisir à rédiger cette nouvelle, probablement la plus longue que j'ai jamais écrite. J'avais même un temps songé à une nouvelle tournant exclusivement de Manon quelques années plus tard mais j'avais rapidement abandonné l'idée. Je pense que parfois il ne faut plus toucher à rien et passer à autre chose.

On continue ce tour d'horizon un poil prétentieux finalement avec Sarah. Avec cette nouvelle, je retrouve mon goût pour les histoires plus sombres avec une intrigue noire contrebalancée par un aspect fantastique où l'émotion prend sa place. Comme souvent chez moi, l'image du père n'a rien d'idéal, c'est peu de le dire. Entre un père que je n'ai pour ainsi dire pas connu mais qui n'avait rien de recommandable et un oncle qui m'enfermait dans une cave dès qu'il devait faire preuve d'un semblant d'éducation lors de vacances forcément oubliables, je garde des rancœurs tenaces et surtout un vide que j'ai depuis bien longtemps renoncé à combler. Pour le reste, je n'ai pas souvenir que Sarah ait été difficile à écrire, je crois que tout s'est fait à peu près naturellement. J'avais déjà exploité l'image d'une luciole lors d'un écrit très court quelques semaines auparavant et je n'étais pas mécontent de pouvoir développer cet angle là. Et d'instaurer quelques atmosphères un peu glauques qui me permettent toujours de voir un peu où j'en suis dans l'écriture, le choix des mots etc. Bref, je pense avoir pris du plaisir de bout en bout.

Avec Sans voix le passionné de doublage (des comédiens spécialisés dans le doublage plutôt) a pu se faire plaisir. Un délirium tremens complètement assumé et bougrement jouissif, tant pis pour les imperfections. Retrouver dans une même nouvelle le maître Roger Carel, Winnie l'Ourson, Actarus et Goldorak, le rêve ! Je ne me souviens pas trop de la genèse d'un tel gloubiboulga mais la fibre nostalgique a du jouer à fond. Il faut dire que l'enfant que j'étais était tombé dans la marmite Goldorak tout petit, s'imaginant même, dans la cour de son école, que le robot de l'espace atterrirait en catastrophe pour lui demander de sauver la terre. C'est dire si j'étais atteint. Quant à Winnie, il s'agit forcément de réminiscences du Disney Channel sur France 3 présenté par le toujours épatant Jean Rochefort et où Winnie et ses amis partageaient l'affiche avec Zorro chaque samedi soir. Pour une fois, j'avais initialement prévu une nouvelle plus longue davantage axée sur les recherches pour retrouver Roger Carel. Mais j'ai eu vite la sensation que je tournerais rapidement en rond. D'où un virage à 180° complètement improvisé à mi-parcours. 

Je m'arrête là... Je sais, comme conclusion, c'est pas top mais alors, pour le coup, j'ai vraiment rien d'autre en stock.

.

jeudi 9 mai 2013

Cheminements dans l'écriture (1e Partie)


Le Cheminement © Gaia Orion


Parce que j'ai depuis aujourd'hui un nouveau lecteur, à la fois sur ce blog mais également de manière plus générale sur l'ensemble de mes écrits, j'ai ressenti le besoin d'expliquer -ou de tenter de le faire- comment je fonctionnais lorsque je me mettais à l'écriture.

Cette fois, c'est un peu particulier puisque cette nouvelle personne écrit elle-même. J'ai donc un regard un peu plus critique, dans le bon sens du terme, qui tendra à me faire gommer quelques imperfections ou mauvais plis tout en me faisant bénéficier de sa propre expérience. 

J'ai toujours été à l'aise dans l'écriture dans sa partie la plus rédactionnelle. J'aime ça et, aussi prétentieux que cela puisse paraître, j'aime mon style. En tout cas, je l'assume pleinement. Mais j'ai un syndrome quasi-permanent de la page blanche. Et je ne tiens la distance que sur un format court. Je n'aime rien de plus que de distiller une atmosphère et si elle est pesante voire oppressante, je ne m'en porte que mieux, ce qui ne m'empêche pas d'essayer de varier les plaisirs et donc les genres. Parfois au détriment de l'intrigue qui reste secondaire chez moi. Je cherche avant tout à toucher les gens, ne serait-ce que l'espace d'une scène, d'un paragraphe ou de quelques mots judicieusement choisis. Lorsque l'on me dit que l'on voit ce que j'écris, on ne peut me faire plus beau compliment. Et si l'intrigue m'importe finalement moins, même si j'essaie de retomber plus ou moins sur mes pattes, c'est parce que, quelque part, je ne sais jamais trop où je vais.

Il faut remonter à 2005 et l'époque des Peyraciens pour que je me décide enfin non pas à écrire mais surtout à montrer ce que je faisais en tout amateurisme. Les Peyraciens étaient les membres d'un forum aujourd'hui disparu tournant autour de Nicolas Peyrac. On pouvait y discuter d'une foultitude de choses et il y avait notamment un espace pour les écrits des uns et des autres entre nouvelles, poèmes et autres rimailles. Il y avait de sacrés talents dont certains se sont encore bonifiés depuis. Et puis moi, timide comme tout, qui avais fini par me lancer. Ainsi est né le premier chapitre de Humeurs assassines que j'avais écrit comme ça, d'un jet, sans savoir où j'allais. Puis, à un moment, sans réfléchir aux conséquences, j'avais ajouté "A suivre..." et j'avais validé mon billet sur le forum. J'avais fait le premier pas et j'avais dès lors mes premiers lecteurs. Je n'avais alors aucune idée de la suite mais je ne pouvais plus reculer. Alors j'ai écrit le deuxième chapitre, je l'ai validé, je suis passé au troisième et ainsi de suite, sans filet ni scénario préparatoire. C'était complètement amateur mais très jouissif. Un côté sans filet que j'ai finalement gardé, en ayant simplement parfois, quelques idées qui germaient en cours de route mais tellement floutées que le suspense était quasiment entier pour moi aussi.

Pour Toby, ce fut différent. Courte nouvelle écrite en moins d'une heure, elle reste la préférée pour bon nombre de mes (quelques) lecteurs. Là, je voulais clairement privilégier l'atmosphère, de manière beaucoup plus prononcée encore qu'auparavant. Cette histoire d'un homme vieillissant et de son chien, sujet banal s'il en est, a découlé d'une autre que j'avais esquissée où un homme âgé et sans défense se faisait agresser chez lui. J'avais l'idée d'un huis clos âpre et oppressant et d'un certain déchaînement de violence nés de ma longue période Stephen King. Finalement, j'avais abandonné très rapidement mais, étrangement, je m'étais attaché au personnage principal et je l'ai donc repris dans Toby en y mettant toute l'empathie que j'avais ressentie pour lui. Ce n'est sans doute pas un chef d'oeuvre bien évidemment, loin s'en faut, mais j'aime à dire que j'ai connu 30 minutes d'état de grâce où tout ce que je voulais écrire sortait comme par enchantement. Je suis sûr qu'à quelques minutes d'intervalle, Toby n'aurait pas véritablement été Toby. D'où cette tendresse particulière que je lui porte près de huit ans plus tard.

Blanche fut compliquée. Elle fut construite comme Humeurs Assassines, par chapitres que je mettais un à un sur le forum des Peyraciens avant même d'avoir écrit les suivants. Mais j'étais dans une période page blanche prononcée. Une nouvelle fois, c'est la recherche d'une atmosphère qui vint à mon secours. Une pluie torrentielle, une curieuse apparition, une voiture qui fait une embardée, une pluie de grenouilles. Et c'était parti pour un voyage dont j'ignorais tout de la destination. Il faudrait que je la relise car je ne n'en ai que des bribes en mémoire mais je me souviens simplement d'un immense soulagement lorsque j'eus écrit le mot "fin" tant j'avais multiplié les fausses pistes et les rebondissements au fur et à mesure des chapitres que je rédigeais toujours sans avoir la moindre idée de la suite. Mais j'avais besoin de ça, de cette part d'inconnu comme d'une puissante adrénaline. Et lors de l'ultime chapitre, j'avais plus ou moins réussi à emboîter les pièces du puzzle. J'avais même réussi un ultime coup de théâtre si je me souviens bien. Pas l'histoire du siècle, non, mais je l'avais tellement rafistolée de toutes parts que je n'étais pas malheureux de m'en sortir à si bon compte.

Avant de poursuivre demain sur quelques autres de mes petits écrits, je profite de ce billet pour souligner à quel point j'ai été (et suis toujours) friand de cette rédaction chapitrée qui pourrait presque s'apparenter à un travail de ligue d'impro. Cela me permettait de ne pas reculer, de m'engager à écrire la suite une fois que le début avait été mis en ligne. Evidemment, d'un point de vue formel, j'aurais sans doute du préparer un ensemble de choses en amont, réfléchir à une intrigue, creuser les personnages, les enchaînements de situations, rédiger des brouillons, mais je crois que j'en ai toujours été incapable. Je crois que toutes les nouvelles que j'ai pu écrire, hormis les très courtes comme Toby, ont toujours obéi à ce mode de fonctionnement basé sur une suite que je découvrais moi-même au fur et à mesure de sa rédaction. D'abord sur le forum des Peyraciens puis sur mes blogs successifs. Avec les imperfections que cela suggère. Et une certaine frustration de ne pas avoir cette rigueur dans la construction de tout ce qui ferait une bonne histoire. Mais je crois qu'aujourd'hui encore, si ce putain de syndrome de la page blanche pouvait m'oublier quelques instants, je procéderais de la même manière. L'avenir seul le dira...

A suivre...

.

lundi 6 mai 2013

Rencontre avec André Chéret, papa de Rahan !


 (Cliquez sur les images pour agrandir)

S'il y a bien une édition du festival de BD de Gruissan à laquelle je n'aurais jamais pensé assister, c'est bien celle-là. Mais les aléas de la programmation (festival toujours au printemps mais rarement aux mêmes dates) et le temps exécrable du week-end des 27 et 28 avril ont un peu changé la donne. Le fait que André Chéret, toujours bon pied bon oeil du haut de ses 75 printemps, soit parrain du festival eut également son importance, tant le Rahan de la grande époque de Pif Gadget m'aura accompagné un incroyable nombre d'années.



Mais, peut-être parce que je venais d'arriver (Nath et moi étions arrivés de Dordogne le matin même après nous être levés à 4h), j'étais étonnamment "absent". J'arpentais la grande salle du Palais des Congrès mais sans feeling particulier. Pire, lorsque Chéret et les autres auteurs arrivent autour de 10h pour les séances de dédicaces, je décide inexplicablement (et presque au grand dam de Nath) d'être raisonnable et de repartir après avoir seulement déambulé une quinzaine de minutes. Faut dire que je n'ai rien du chasseur d'autographes contrairement à tous ceux qui peuvent patienter des heures durant pour obtenir le maximum de dédicaces à la fin de la journée.




Mais parce que la nuit porte conseil (et Nath aussi d'ailleurs, à ma grande surprise), j'y suis quand même retourné le dimanche matin. Comme à chaque fois que je rencontre une pointure de la BD, j'étais tout intimidé (d'autant que Chéret ne parle pas lorsqu'il dédicace, ça n'aide pas) mais j'ai quand même pu dire au père de Rahan (n'oublions pas le regretté Roger Lecureux) tout le bien que je pensais de lui et combien Rahan avait marqué durablement de son empreinte ma période Pif Gadget. J'ai même pu prendre une photo, ce que sa femme n'autorise pas systématiquement. Bref, la journée avait bien commencé et ce n'était que le début.




Car tout en ayant ces quelques mots maladroits à l'attention d'André Chéret et tout en le regardant me faire ma petite dédicace, je ne pus empêcher mon regard glisser vers un petit classeur qui renfermait quelques originaux aux encres de couleurs format "marque page". Les photos ne rendent pas grâce au superbe travail de Chéret, surtout que je n'ai pas souhaité enlever la protection plastifiée tant que je ne sais pas encore comment encadrer ces petits trésors. Car oui, j'ai craqué. Ou plutôt, j'avais décidé de ne pas craquer et d'être raisonnable. Encore. Et une nouvelle fois, c'est Nath qui m'a poussé à la consommation. Et comme mon anniversaire approchait et qu'elle n'avait pas d'idée, le prétexte était tout trouvé. Dans un premier temps, j'avais une préférence pour celle juste en dessous que Nath trouvait bien évidemment trop sombre (ben oui, mais elle s'attendait à quoi, vu que c'est un paysage nocturne ! ! ! ) Bref, on coupe la poire en deux et je prends donc le Rahan "en plein jour" pleines couleurs et le Rahan en N&B hurlant son fameux cri. Mais finalement, je ne résisterai pas et reviendrai chercher mon premier coup de coeur dès la réouverture du salon en début d'après-midi. Après tout, on ne croise pas le papa de Rahan tous les jours avec l'opportunité de repartir avec quelques originaux. Maintenant, je n'ai plus qu'à trouver le meilleur moyen de mettre tout ça bien en valeur, pas évident vu le format.




Et l'album en lui-même me direz-vous ? Le Trésor de Bélesta date de l'époque post-Pif Gadget et ce n'est donc clairement pas le meilleur qu'il m'ait été donné de lire. Mais l'esprit est bien là (le fils de Roger Lecureux a plutôt vaillamment repris le flambeau de son illustre père). Après, je reprocherais surtout une certaine propension à étendre un peu vainement l'intrigue, d'autant que personnellement j'ai toujours pensé qu'un format de 20 pages par histoire allait mieux pour Rahan que 48. La partie consacrée à l'apprentissage (et à la compréhension) de la poterie n'en finit pas et ralentit le rythme, c'est un peu dommage. Mais l'essentiel est là : les valeurs du fils de Crâo, les enseignements qu'il veut prodiguer à ceux-qui-marchent-debout, ses frères et l'entraide des hommes dans l'adversité. Côté dessins, Chéret connait son affaire et si, au fil du temps qui passe, certains visages sont un poil plus grossiers (c'est surtout vrai sur le dernier album en date de 2010, pas vraiment dans celui-ci de 2007), la maîtrise de l'ensemble reste assez bluffante. Bref, un très grand nom de la BD de passage à Gruissan, ça ne devait pas se rater. Et c'est Nath qui le dit, alors... ! 




Je dédie ce petit billet à l'un de mes plus fidèles lecteurs, Christian, féru d'Histoire mais pas de BD. As-tu déjà lu les aventures du fils des Âges Farouches, Christian ? ;-)

.