mercredi 4 février 2015

Captain America (Rick Remender / John Romita Jr)





J'avais longtemps hésité à acheter cette histoire de Captain América en deux volumes et 10 parties. D'abord parce que je ne suis pas fan du personnage, enfin disons surtout que je n'en connais pas grand chose. Jamais lu ses aventures, pas davantage vu les films centrés sur lui. L'idée du patriote américain type ne m'a jamais emballé, peut-être à tort, mais bon...
Ensuite parce que le dessinateur John Romita Jr est capable du pire comme du meilleur et que l'extrême admiration que j'avais pour le bonhomme du fait que je lui dois, à mon sens, les meilleures aventures de Spiderman au début des années 80, s'est muée en un respect parfois un tantinet désabusé.
Enfin parce que l'histoire se place encore dans une énième dimension mystérieuse pleine d'extra-terrestres belliqueux et que je ne suis pas friand de ces épopées pseudo-cosmiques.


Mais je suis faible. Romita Jr reste Romita Jr et la planche ci-dessus montre combien il en a encore sous le pied quand il veut bien ne pas bâcler son travail. Et puis il a un sens de la mise en scène souvent brillant lors d'affrontements apocalyptiques. Surtout, cette histoire marque le point final de sa collaboration avec Marvel et rien que pour cela, l'achat se justifie.



Je vais faire rapide concernant le topo, histoire de ne pas trop dévoiler l'intrigue pour ceux qui voudrait garder le plaisir de la découverte, bien que l'ensemble ne soit pas d'une originalité folle. Steve Rogers alias Captain America se retrouve piégé dans un univers hostile, la dimension Z où le pas beau de service, le megalo scientifique nazi Arnim Zola, mène des expériences génétiques sur lui pour en faire profiter sa progéniture. Evidemment, rien ne se passe comme prévu et Captain America se retrouve en fuite avec le tout jeune fils de Zola. Un exil de plusieurs années, tout au moins dans le temps tel qu'il se définit dans cette dimension Z, dont les conditions extrêmes pour survivre mettront les nerfs de notre héros à rude épreuve.


Après avoir refermé le second tome, je n'ai pas pu m'empêcher de penser que cette histoire étalée sur environ 200 pages aurait gagné à être vraiment raccourcie. L'action est omniprésente excepté dans les moments salvateurs où le scénariste propose des flash-back sur l'enfance de Steve Rogers. Une enfance difficile et empreinte d'une violence certaine mais dont l'émotion véhiculée tranche vraiment avec l'aspect bourrin du reste de la saga. Personnellement, ce sont ces moments que j'aurai le plus appréciés, avec une mise en couleurs parfaite pour ces retours en arrière.


Le reste n'est quasiment constitué que de scènes d'action, hormis quelques moments plus intimistes autour de la relation entre le Captain et son jeune protégé. Et cette représentation particulièrement sanglante des combats m'a gêné. Je ne suis pas particulièrement bégueule pourtant. Il m'arrive de voir des films d'horreur, je regarde The Walking Dead dont je lis aussi les comics, bref je ne suis pas fâché avec l'hémoglobine. Mais cette violence graphique doit servir le propos, elle doit être légitime. Or, pour moi, ici, elle ne l'est clairement pas. John Romita Jr continue son travail de sape entamé avec les Kick-Ass avec des effets visuels qui vont jusqu'au grotesque. Comme le splash ci-dessus où Captain America saigne de chaque pore de la peau. Un héros n'est plus celui qui se relève d'une rude adversité, c'est celui qui survit à un déferlement de violence où chaque coup l'amène vers une rupture de plus en plus inéluctable. Quand je lisais mes Strange ou mes Nova, nos héros n'étaient pas épargnés, on vibrait pour eux, les histoires prenaient autant aux tripes et nous tenaient véritablement en haleine sans qu'il y ait besoin de passer par une telle violence graphique. Cela dit, c'est la tendance actuelle, notamment au cinéma. Il faut en mettre plein la vue. Regardez par exemple La Planète des Singes : l'affrontement. Très bon film mais la scène de baston finale dure près de 30 minutes dans un festival d'effets spéciaux en tous genres jusqu'à saturation. Je parle de ce film précisément parce que je l'ai vu récemment mais c'est valable pour une flopée de films dits spectaculaires.



Bref, tout ça pour dire que, vœu pieux je m'en doute, j'aimerais bien que nos auteurs et dessinateurs actuels reviennent un peu aux fondamentaux avec des intrigues ciselées, véritablement prenantes et surtout crédibles, des atmosphères travaillées. Des œuvres coup de poing qui ne seraient pas constituées que de coups de poings. 
Pourtant, malgré les réserves émaillant ce billet, je ne regrette pas mon achat. Le duo Romita / Janson offre toujours de belles choses et le récit propose aussi quelques fenêtres intimistes bienvenues. Savoir que l'ultime planche du livre est aussi la dernière de Romita pour Marvel (a priori) a une résonance particulière. Alors oui, ce n'est pas l'oeuvre du siècle mais l'ensemble se laisse lire sans déplaisir. De là à dire que je m'en souviendrai dans quelques jours / semaines / mois, c'est une autre histoire...



Me voilà à la fin de ce billet. Et je dis quoi, moi, à mon pote Arnaud (à qui je dédie ce post) qui m'a demandé ce que j'en pensais, histoire de comparer nos impressions ? En fait, Arnaud, je ne sais pas si je le conseillerais ou pas à un éventuel acheteur qui me demanderait conseil. Si on est réfractaire à John Romita Jr, certainement pas. Même si le célèbre dessinateur m'a semblé, à quelques exceptions près, bien plus inspiré que sur Kick-Ass par exemple. Mais si le trait de Romita Jr n'est pas rédhibitoire, si le personnage de Captain America non plus et si les histoires prenant place dans des univers cosmiques (pléonasme ?) ne rebutent pas, alors oui, l'investissement vaut le coup d'oeil. A condition de ne pas trop en attendre et de considérer l'ensemble comme un vrai défouloir. Ou comme l'oeuvre testamentaire d'un dessinateur tellement talentueux à la base et qui aura tant apporté à la mythologie Marvel.

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