Parfois, je me demande sur quelle île coupée du monde j'habite. J'adore Miller et Mazzucchelli et je suis quand même complètement passé à côté de ce petit bijou qui revisite les origines de Batman. Heureusement, Urban Comics ayant eu la bonne idée de rééditer la série, j'ai pu enfin rattraper mon retard de lecture.
Miller part des fondamentaux (Traumatisé par le meurtre de ses parents alors qu'il n'était qu'un enfant, Bruce Wayne tente d'éradiquer la vermine de Gotham City, sous les traits de Batman) mais cela ne l'empêche pas de se réapproprier le mythe et de développer une intrigue solide, toute en noirceur,tournant quand même essentiellement autour de l'inspecteur Jim Gordon. Miller signe un scénario très urbain où tout est une nouvelle fois synonyme de pouvoir et de corruption dans un Gotham gangrené par le crime et les magouilles politiciennes. Gordon va devoir s'employer pour faire sa place dans un monde où le danger est partout, surtout auprès de ses collègues. L'ensemble se lit avec énormément de plaisir même si la fin est un peu abrupte. En tout cas, moi, je ne l'ai pas vue arriver. La traque de Batman est impressionnante mais ne nous y trompons pas : le héros de l'histoire, c'est l'inspecteur Gordon. Miller aime visiblement beaucoup ce personnage de flic intègre dans un milieu extrêmement hostile et c'est sans doute pour ça qu'il ne va pas jusqu'à certaines extrémités, en épargnant finalement ceux qui lui sont proches. Et comme il fallait bien également poser les (fragiles) bases du Batman sauveur du peuple, l'ensemble est plutôt cohérent.
Au dessin, David Mazzucchelli fait une nouvelle fois des merveilles, bien qu'à mon sens Daredevil : Born Again reste son plus beau fait d'armes. J'adore ce dessinateur dont le style sied particulièrement à la noirceur de Gotham, ville sale et pourrie jusque dans ses bas-fonds les plus obscurs. Il signe aussi un remarquable tour de force lors d'une traque gigantesque des forces de l'ordre sur Batman où son sens du découpage très cinématographique fait une nouvelle fois merveille. L'étau se resserre sur l'homme chauve-souris et la tension est palpable à chaque case. Franchement, à part une ou deux représentations de Batman qui m'ont laissé perplexes (mais c'est bien pour pinailler) et quelques menus soucis de lisibilité en de très rares occasions, il n'y a rien à jeter.
Au final, Batman Année Un est un ouvrage hautement recommandable, d'autant qu'il repose les bases de la genèse de Batman et de ses difficultés à lutter contre le crime. Il a aussi l'avantage de proposer un angle intéressant en mettant le futur commissaire Gordon au centre d'intrigues mafieuses dont les connections le dépassent. Pour autant, ne vous attendez pas à voir surgir le Joker, le Pingouin, l’Épouvantail ou tout autre "vilain" costumé. On retrouve certes le procureur Harvey Dent mais il est encore l'allié de Batman, bien loin du retors Double-Face qu'il sera quelques années plus tard. Pour le reste, avec Frank Miller au scénario et David Mazzucchelli au dessin, on ne peut pas de toute façon être déçu. Bienvenue dans l'enfer de Gotham.
.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire