samedi 7 mars 2020

André Chéret, adieu et 1000 merci pour tout



Il est des disparitions qui  marquent plus que d'autres. Celles de Chéret est de celles-là. Parce que Rahan est un vrai pan de ma culture BD, un essentiel, un condensé de plaisir de lecture et de relecture, d'évasion, d'histoires extraordinaires, d'anachronismes savoureux laissant libre court à l'imagination débordante de deux artistes majuscules... L'aventure avec un grand A scénarisée par Roger Lécureux et mise en scène de main de maître par André Chéret. 

Rahan, pour moi, ce fut tout d'abord une claque prise dans les pages de Pif Gadget. Pas celui-ci évidemment : le n°1 de Pif est sorti en mars 1969 et je n'étais même pas né ! Mais Rahan était déjà présent dans les pages de ce premier numéro, à la poursuite du soleil d'est en ouest pour sa première apparition, avec la toute première planche ci-dessous. Déjà, la remarquable maîtrise de l'anatomie de Chéret fait mouche et le dessinateur n'aura de cesse de se perfectionner, livrant des planches réalistes et sacrément dynamiques, avec un sens du mouvement peu commun. Avec Lécureux et Chéret, on ne lisait pas une BD, on y plongeait tête la première et on vibrait à chacune des péripéties du fils des Âges farouches. 







Les épisodes marquants ne manquèrent pas. Je me souviens tout particulièrement de l'épisode "L'île des morts vivants" qui m'avait fait bien flipper. Ou de "La mort de Rahan" à laquelle je ne croyais évidemment pas mais quand même... le doute s'insinuait au fil des pages...


Mais je crois que l'épisode qui m'aura le plus marqué restera "le grand amour de Rahan". Je me souviens de cette couverture comme si c'était hier. Une très belle histoire, angoissante et émouvante à souhait jusqu'au "sacrifice" de Naouna qui renonce à s'attacher durablement à Rahan pour ne pas le priver de ce qui est le plus important pour lui : la liberté, celle de parcourir le monde et d'aller à la rencontre de ses frères, les hommes, pour apprendre d'eux et leur enseigner ce qu'il a appris au gré de ses nombreuses escapades. 


Je possédais les 42 tomes de cette intégrale aux éditions Vaillant dont j'adorais les couvertures et ce cerclage si caractéristique autour du personnage principal. Dommage que Soleil n'ait pas gardé le principe pour leurs intégrales suivantes.




J'étais tellement fan que je m'étais même amusé à reproduire deux d'entre elles. 25 ans que je m'y suis collé, déjà ! Faudrait que je réessaie un de ces quatre. J'ai forcément perdu la main mais ce pourrait être fun de s'y remettre. J'étais vraiment fasciné par le rendu de la musculature chez Chéret, ce sens du détail, ce dynamisme qui semblait tellement facile chez lui.



Ne pouvant pas garder toutes mes séries en X exemplaires (déjà que j'ai les Gaston de Franquin en triple...), j'avais revendu l'intégrale Vaillant pour privilégier celle de Soleil, la version noire, très belle au demeurant.



Je reviens brièvement sur mon unique rencontre avec André Chéret, en 2013 dont je parle plus longuement ICI. Ce grand monsieur respirait la gentillesse mais il parlait très peu, et comme j'étais moi-même assez intimidé, ça n'a pas aidé. Mais j'ai pu lui dire, sans doute en bafouillant, combien il avait comblé au delà de l'imaginable les envies d'évasion de l'enfant que j'étais et que j'espère bien être resté, au moins un peu.



L'occasion de refaire aujourd'hui quelques photos de mes petites acquisitions de l'époque : des originaux à l’encre de Chine ou aux encres de couleurs, format marque-page, ce qui présentait l'avantage de les rendre abordables et de pouvoir se faire un petit plaisir pas si coupable.








Aujourd'hui, mon coeur est un peu vide de cette page qui se tourne mais Rahan restera présent, comme il l'a toujours été. D'ailleurs, la porte de mon bureau me ramène sans cesse à lui. Pas de risque que ça change.
Merci Monsieur Chéret pour ces décennies de pur bonheur ! 

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